Grossesse et bientôt maman

Pourquoi fait-on des enfants ?

L'amour

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La révolution sentimentale moderne a mis l'amour au fondement du couple, et de facto, de la famille. Cela pose de nouvelles questions, de nouveaux défis à l'individu, l'amour n'étant pas un instinct, mais une construction (de l'esprit), délicate, mouvante, fragile, se tricotant avec ses joies et ses peines, ses réussites et ses erreurs, au jour le jour, du mieux que l'on peut. Cette évolution des mentalités toute récente amène 2 changements d'importance: primo, ce que l'on appelle communément « l'instinct maternel » ne serait rien d'autre qu'une illusion, dès lors, plagiant une célèbre phrase de Simone de Beauvoir (une des rares femmes a avoir assumé publiquement son absence de désir d'enfanter), il conviendrait de clamer que, contrairement à ce qu'affirme la Doxa populaire : "l'on ne nait pas mère, on le devient".

On deviendrait mère par la mise au monde de son enfant, mais aussi et surtout par ce lien affectif que nous aurions à construire, en interaction avec lui, au quotidien. Avec tout ce que cela induit de contingence, tâtonnement, d'essais, de fragilité, d'erreurs, d'imperfections. Là est la vraie libération, chaque mère et chaque enfant, échappant à une sorte de déterminisme et de programmation génétique, ayant désormais la liberté de nouer, en fonction de leur vécu, leur histoire propre, leur passé, ce lien affectif indéfectible qui les unira toute une vie. Ce lien mère/enfant n'est pas linéaire, mais s'invente, se re-crée, se nourrit, dès lors loin des schémas et stéréotypes archaïques et sclérosants du passé et leur cohorte de droits et de devoirs réciproques. Nous ne sommes pas parfaits et nos enfants non plus. Ouf.... Le lien qui nous unit est essentiellement émotionnel... re-ouf !

Secondo, là où, jusqu'à peu, on les cantonnait à un rôle de Père, incarnation de la loi, de l'autorité patriarcale omnipotente, grand pourfendeur  de "coupage de cordon" entre l'enfant et sa mère, le partage actuel du pouponnage entre les parents et la toute récente implication des géniteurs dans l'éducation de leur progéniture ont permis aux hommes d'investir affectivement leur lien filial. Ces derniers trouvant dans leur nouvel habit de Papa (et notamment en cas de séparation, avec l'obligation d'assumer seul et pleinement le quotidien des enfants) une possibilité inédite d'extérioriser une partie d'eux-même peu explorée jusque là, peu explorée par ailleurs dans leur vie sociale et professionnelle. Ces néo-papas n'hésitent plus à assumer pleinement le lien affectif qui les unit à leurs enfants, et revendiquent leur volonté de s'impliquer dès la naissance dans leur quotidien et leur éducation.

L'amour que nous portons à notre enfant se veut inconditionnel, désintéressé, absolu. Pas si désintéressé que ça, car de manière inconsciente, l'enfant est aussi là pour incarner, porter, le désir et l'espoir de ses parents. Plus ou moins consciemment, en enfantant, l'individu nourrit l'illusion qu'il corrigera les erreurs éducatives des générations précédentes. Le plus grand fantasme en la matière est qu'il arrivera à élever un enfant parfait, sain, heureux, intelligent, épanoui, qui réussira (polytechnicien, champion de tennis, danseuse étoile, cosmonaute...) là où ses  parents ont échoués. Toutes les blessures narcissiques liées à sa propre enfance seront ainsi réparées, les erreurs de nos propres parents évitées, les névroses, frustrations, conflits, chagrins inérants (voire indispensables) à la relation parents-enfants étant totalement gommés, occultés. En oubliant que la frustration fait partie de la vie, de la construction psychique de l'enfant. C'est même elle, et son acceptation, qui marque le passage de la pensée magique (le monde m'appartient, j'en suis le nombril et mon pouvoir est infini) de la toute petite enfance à  l'âge de raison. Vers 7/8 ans, l'enfant prend conscience qu'il n'est pas le centre du monde, renonce à son omnipotence, réalise qu'il est mortel, que son désir n'est pas absolu et qu'il ne suffit pas de vouloir une chose pour qu'elle se réalise ! L'acceptation de ses limites, d'une certaine forme de renoncement au « tout-tout-de-suite », à sa fusion totale avec le monde, ses parents (maman n'est pas moi, je ne me marierai pas avec papa quand je serai grande, ce n'est pas parce que c'est toi qui m'a voulu que tu me dois tout !) est une étape majeure dans la construction psychologique de l'enfant, et de l'individu en tant qu'être autonome, indépendant, responsable de ses actes et de ses pensées.

Car, l'enfant échappe toujours et dès le premier jour de sa conception, aux motivations plus ou moins conscientes qui ont présidées à sa naissance. Il est par essence une œuvre con-jointe incarnant, par son existence même,  la volonté mutuelle de deux êtres (ses géniteurs) de s'ouvrir à l'altérité (lui). Une altérité à la fois proche et radicalement autre... L'enfantement est l'expression par excellence de l'apprentissage et de  l'acceptation de la perte de la maîtrise par l'individu et non celle de la puissance de son égo. Du lâcher-prise plus ou moins consenti et du décentrement vers autrui.

Alors, entre responsabilité et insouciance, narcissisme et générosité, liberté et fusion, égoïsme et abnégation caractérisant cet état fluctuant et mouvant qu'est la parentalité, pas de panique si dès sa naissance et jusqu'à... ses 50 ans (et encore!), votre tête blonde adorée vous étonne, vous échappe, vous énerve, vous rejette, vous juge, ne répond pas à vos attentes, n'adhère pas à ses valeurs que vous avez pourtant mis des années a essayer de lui rentrer dans le crâne, ne vous remplit pas de fierté et ne comble pas totalement (voire pas du tout) vos aspirations profondes et le plaisir narcissique que vous vous imaginiez être en droit d'attendre de lui dès sa plus tendre enfance et pour toujours ! Si aujourd'hui on choisit bel et bien de faire des enfants, on n'a, globalement, aucune prise sur les surprises jalonnant à tout âge cette merveilleuse et mouvementée aventure que représente la parentalité, cette étonnante et riche expérience de vie avec eux... Et quelque part, c'est tant mieux.

 

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mimi (non vérifié) , 09 mars 2015
Merci pour l'article.Je suis présentement en processus de fecondation in vitro et depuis jai de sérieuses craintes face au negatif davoir des enfants..Une crise d'anxiété m'envahit depuis 3 mois et l'idée davoir un enfant devient ambivalent tellement jai peur.Larticle me fait du bien à lire et vos commentaires aussi.merci a tous.