Rappelez-vous, c’était il y a trois ans, Elisabeth Badinter publiait « L’Amour en plus » et lançait cette idée phare : l’instinct maternel n’existe pas ! La société essaye de faire croire aux femmes qu’elles doivent être des mères parfaites. Mais avoir des enfants n’est pas une obligation ! affirme Mme Badinter. Cela semble une évidence, quarante ans après la création du Mouvement de libération de la femme (MLF). Et pourtant, la philosophe observe de profonds changements dans la société. Le discours ambiant culpabilise de plus en plus les femmes qui font le choix de leur travail avant celui de la grossesse. La femme qui n’allaite pas est stigmatisée comme une « mauvaise mère », en témoigne l’interdiction depuis 1998 de vendre du lait en poudre dans les cliniques.
Elisabeth Badinter tire aujourd’hui la sonnette d’alarme, armée d’un nouveau livre (« Le Conflit. La femme et la mère »). La philosophe avait à cœur de l’écrire depuis bien longtemps. Il a finalement vu le jour en février, pour susciter aussitôt une véritable polémique. Au sein du gouvernement d’abord, où la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet a reproché à Elisabeth Badinter de se « tromper de combat ». Mme Badinter accusait en effet l’ex-secrétaire d’Etat de contribuer à l’asservissement des femmes en les incitant à utiliser des couches lavables ! Selon Mme Badinter, demander un tel effort aux femmes est totalement déraisonnable au regard de la vie surchargée qu’elles mènent, entre vie professionnelle et exigences familiales.
Les détracteurs d’Elisabeth Badinter se sont empressés de traiter la philosophe d’ « archéoféministe », autant dire le summum de la ringardise. Pourtant ce combat mérite d’être examiné de plus près car, s’il est parfois excessif, il met en exergue des dérives réelles de notre société et du regard porté sur les femmes, parfois par les femmes elles-mêmes ! Celles qui ont des enfants trouvent aussitôt suspectes celles qui refusent d’en avoir, explique Mme Badinter. Elles cherchent alors des raisons du côté de la psychanalyse pour expliquer cette « anormalité », ce refus « contrenature ». Le cliché le plus souvent avancé est celui de l’enfance malheureuse qui expliquerait tout. Comme si toutes les femmes qui avaient des enfants avaient eu une enfance idyllique !
« On est passé de moi d’abord à l’enfant d’abord » : les ambitions personnelles des femmes apparaissent aujourd’hui d’un égoïsme criminel. On n’est plus très loin du discours de nos arrières-grands-mères : « une femme n’est pas complète si elle n’a pas d’enfants ». Le livre d’Elisabeth Badinter est avant tout une mis en garde : le féminisme a beaucoup apporté aux femmes à une époque où elles avaient très peu de droits. Mais ces acquis ne sont pas définitifs, ils doivent être un combat sans cesse renouvelé pour que la liberté intime de la femme ne tombe pas, elle aussi, en désuétude.
Elisabeth Badinter : le conflit intime de la femme…

La philosophe fait sensation en évoquant une régression du féminisme !
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